l'Agence Japonaise de Coopération Internationale

  • 日本語
  • English
  • Francais
  • Espanol

RSS Feeds

Nouvelles du terrain

12 octobre 2021

[13 octobre : Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe] Entretien avec TAKEYA Kimio, promoteur du concept «Reconstruire en mieux» dans le cadre des négociations des Nations unies : Partager les connaissances solides du Japon en matière de RRC avec le monde


PhotoTAKEYA Kimio, conseiller technique éminent sur la réduction des risques de catastrophe à la JICA. Il a reçu en 2021 les félicitations du ministre des Affaires étrangères pour ses contributions dans le domaine de la réduction des risques de catastrophe et de la reconstruction.


«Des volumes de précipitations sans précédent». «Agir pour sauver des vies». Ces derniers mois, les catastrophes naturelles survenues au Japon ont régulièrement fait la une. Malgré le risque croissant posé par de telles catastrophes dans le monde entier en raison du changement climatique, de nombreux pays, en particulier des pays en développement, ne disposent pas encore de mesures suffisantes de réduction des risques de catastrophe (RRC). Un seul événement naturel peut mettre en danger la vie d'une population, menacer son capital économique et réduire à néant les actifs sociaux existants.

Dans ces circonstances, il convient de réfléchir aux moyens de se préparer, à travers des investissements ciblés, afin de réduire les risques posés par les aléas naturels. Ces activités de préparation offrent en outre l'occasion de former des pays et des sociétés plus résilients face aux catastrophes lorsqu'elles sont inévitables. Pour avancer sur ces deux volets, la préparation et la gestion des catastrophes, il est essentiel que la philosophie du «Reconstruire en mieux» prenne racine non seulement dans les pays en développement, mais dans le monde entier, afin de soutenir les pays et les sociétés.

TAKEYA Kimio, conseiller technique éminent sur la RRC à la JICA, mène ces efforts à l'échelle mondiale. Il est animé par une conviction et une détermination inébranlables, nées de ses 40 ans d'expérience dans le domaine des catastrophes naturelles, aux côtés des dirigeants du monde entier, pour créer une «société résiliente face aux catastrophes».

* La Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophes a été instituée par les Nations unies comme une journée internationale de réflexion sur les moyens de minimiser les risques de catastrophes déclenchées par des aléas naturels.

Le Japon, superpuissance de la RRC, est un moteur de la coopération dans ce domaine

«Il faut avant tout investir dans la prévention des catastrophes. Lorsque cela n'est pas possible, il faut "reconstruire en mieux", une notion avec laquelle tous les professionnels de la RRC sont au moins vaguement familiers. Il s'agit d'utiliser la catastrophe comme déclencheur pour reconstruire une société plus résiliente qu'auparavant. Pour cela, il faut non seulement réhabiliter, à savoir rétablir les infrastructures dans leur état initial, mais aussi reconstruire au sens de "rendre plus fort". Cependant, le concept "Reconstruire en mieux" (Build Back Better en anglais) n'a encore jamais fait l'objet d'une définition précise ou d'un consensus dans les discussions internationales.»

Lors de la troisième conférence mondiale des Nations unies sur la réduction des risques de catastrophe qui s'est tenue à Sendai, dans la préfecture de Miyagi, en mars 2015, le cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 a été adopté en tant que cadre international pour la réduction des risques de catastrophe pour les 15 prochaines années.

En tant que membre de l'équipe de négociation du gouvernement japonais, pendant près d'un an, M. Takeya s'est efforcé, avec beaucoup de persévérance et d'enthousiasme, de parvenir à un accord avec les participants de diverses nations afin de reconnaître l'importance des investissements avant les catastrophes et, à défaut, d'inclure le concept « Reconstruire en mieux » dans le cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe. C'est ainsi que M. Takeya a acquis le surnom de «M. Reconstruire en mieux».

Photo(À gauche) Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies (à gauche), et Margareta Walström, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies pour la réduction des risques de catastrophe, lors de la troisième conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe (ces postes ont pu changer de titulaire depuis la conférence).

(À droite) Après d'âpres négociations, M. Takeya (à gauche) est parvenu à un accord sur l'importance des investissements pour la prévention des catastrophes, ainsi que sur la définition et la portée des initiatives «Reconstruire en mieux» en tant que mesures de substitution, lors de la troisième conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophe.


Photo

«Pourquoi reconstruire en mieux ? Pour éviter que les mêmes dommages ne surviennent à nouveau et assurer la durabilité de la société dans son ensemble. Idéalement, il faudrait investir avant les catastrophes pour empêcher qu'elles ne se produisent en premier lieu. Toutefois, si une catastrophe arrive avant les investissements, nous devons déterminer quelles populations et quels secteurs ont été les plus touchés par la catastrophe, et rendre la société plus résiliente sur cette base. Un rétablissement de façade, laissant la société tout aussi vulnérable qu'auparavant, est inutile.»


L'expertise du Japon en matière de RRC, l'une des superpuissances mondiales dans ce domaine, donne un sens concret à ces paroles fortes. Au Japon, environ 50 % de la population vit dans des plaines inondables le long des cours d'eau et 75 % des actifs y sont concentrés. Ces zones, quoique protégées par des mesures gouvernementales de prévention structurelle, sont susceptibles d'être inondées. Le Japon a donc conçu un éventail de mesures, non seulement pour répondre aux inondations, mais aussi pour améliorer le niveau de contrôle afin que les habitants puissent continuer à vivre dans ces zones. Même après la Deuxième Guerre mondiale, période durant laquelle le Japon était considérablement appauvri, le pays a régulièrement investi dans la RRC et continue de le faire jusqu'à aujourd'hui.

«Environ 75 % des dommages économiques liés aux catastrophes naturelles dans le monde sont causés par des inondations. La majorité des inondations se produisent dans les pays asiatiques connaissant une période de mousson comme le Japon. C'est le seul pays du monde développé à pouvoir se targuer d'avoir mis en œuvre des mesures efficaces de RRC grâce à sa compréhension spécifique des catastrophes naturelles, distincte de celle des pays occidentaux où ce type d'événement est relativement rare.»

Les dirigeants nationaux doivent impulser les efforts de RRC

PhotoSur la couverture du plan d'aide à la reconstruction après le passage du typhon Haiyan, le slogan «Build Back Better» (Reconstruire en mieux) a été inscrit pour la toute première fois, peu après la réunion.

En près de 40 ans de carrière dans le domaine de la RRC, M. Takeya a promu le concept «Reconstruire mieux » à divers titres, notamment en tant que consultant pour le secteur privé, expert auprès de la Banque asiatique de développement et conseiller technique éminent auprès du président de la JICA.

Entre autres expériences, il se souvient de sa participation, en tant que membre de la JICA, aux activités de reconstruction menées aux Philippines après le passage du typhon Haiyan en 2013.

«Les pays asiatiques commençaient à comprendre l'intérêt du "Reconstruire en mieux", même s'il n'y avait pas de définition claire de ce terme dans leurs plans de rétablissement. Lors d'une réunion sur la reconstruction après Haiyan, la JICA a fait la suggestion suivante : "Pour que les Philippins retrouvent espoir en l'avenir, il est essentiel d'esquisser rapidement un plan avec une philosophie de reconstruction soucieuse d'éviter la répétition de catastrophes similaires et de reconstruire une société plus résiliente". Lors de cette même réunion, à laquelle assistaient de nombreux dirigeants nationaux, d'autres agences d'aide ont communiqué le montant du budget de réhabilitation qu'elles pouvaient soutenir. La proposition de la JICA était la seule à défendre fermement une philosophie de reconstruction visant à bâtir une société résistante aux catastrophes.»

Le président de l'époque, Benigno Aquino, a bien saisi l'importance de cette question et formulé un programme de réhabilitation et de rétablissement après le typhon Haiyan axé sur le principe «Reconstruire en mieux». Par la suite, lorsque le président Rodrigo Duterte a été élu, les Philippines ont compris que l'investissement dans la prévention était beaucoup plus efficace que la reconstruction et, sous le slogan «Build Build Build», le pays a multiplié par cinq le budget de préparation aux catastrophes de 2017 à 2022. Aujourd'hui, le président continue de concentrer les efforts de son administration sur les mesures proactives avant les catastrophes.

«Lorsque les dirigeants politiques comprennent l'importance des investissements pré-catastrophe et agissent en conséquence, c'est la conscience du pays tout entier à l'égard de la RRC qui change. Aujourd'hui, les Philippines sont leaders en matière de RRC en Asie.»

PhotoM. Takeya (à gauche), un an après le passage du typhon Haiyan aux Philippines, fait une présentation sur l'avancement de la reconstruction aux côtés du vice-président, du ministre de la Reconstruction, du secrétaire aux travaux publics et aux autoroutes et d'autres hauts responsables du gouvernement philippin.


Lorsque le typhon Vamco a frappé la région métropolitaine de Manille en 2020, on estime que les mesures avancées de lutte contre les inondations ont permis de réduire de 85 % la superficie inondée et les dommages économiques.

On ne peut nier la possibilité que le Japon connaisse lui aussi des catastrophes de grande ampleur à l'avenir. Nombreux sont ceux qui ne se sentent pas concernés par les catastrophes parce qu'ils ont pu en éviter les dommages grâce aux investissements réalisés par les générations précédentes. Toutefois, il est temps pour nous de reprendre la réflexion sur ce qu'il convient de faire pour créer une société plus résiliente face aux futures catastrophes.

Rôle de la JICA pour l'édification d'une société durablement résistante aux catastrophes

En se basant sur le cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, chaque nation participante a accéléré l'élaboration de stratégies nationales et locales de RRC, notamment à travers des investissements pré-catastrophe sur la période 2015-2020.

«Tous les pays en développement n'ont pas finalisé leurs plans de prévention des catastrophes. La JICA travaille sur la formulation des plans de RRC afin de déterminer s'il est possible de réaliser des investissements systématiques aptes à prévenir une baisse du PIB en cas de catastrophe. En examinant les initiatives de RRC du Japon, nous ne pouvons pas affirmer que toutes les politiques mises en œuvre étaient pertinentes à 100 %. Il faut marier intelligemment les technologies de RRC du Japon avec les besoins des partenaires et trouver les bonnes associations pour chaque pays en fonction de sa situation et de la taille de ses actifs.»

En 2021, nous entrons dans une période clé où chaque pays devra mettre en œuvre ses nouveaux plans de RRC et façonner une société durable.

«En tant qu'organisation de coopération internationale expérimentée, la JICA doit discuter avec les dirigeants de chaque pays de la place des investissements pré-catastrophe et de la reconstruction basée sur le concept "Reconstruire en mieux". La JICA doit montrer la voie à suivre pour construire une société plus résistante aux catastrophes.»

PhotoTAKEYA Kimio, conseiller technique éminent auprès du président de la JICA


M. Takeya a été président d'un cabinet de conseil privé, spécialiste senior en gestion des catastrophes liées à l'eau au département du développement durable de la Banque asiatique de développement et conseiller technique éminent auprès du président de la JICA. Il enseigne également en tant que professeur invité à l'Institut international de recherche en sciences des catastrophes (IRIDeS) de l'Université de Tohoku. Au lycée, il a joué au football, remporté un championnat national et représenté le Japon aux Jeux asiatiques des moins de 20 ans (U20). Cet automne, si les circonstances le permettent, il prévoit de parcourir à vélo les zones touchées par le grand séisme de l'est du Japon avec ses élèves. Il est originaire de la ville de Kyoto.



Haut de page

Copyright © l'Agence Japonaise de Coopération Internationale