Événement

PM Elcom est l'une des 80 entreprises pilotes du « Projet d'amélioration de la qualité et de la productivité de l'industrie tunisienne » (KAIZEN) mis en œuvre par la JICA. Le projet KAIZEN vient booster la compétitivité industrielle en Tunisie, et a déjà contribué à l'amélioration de la productivité des entreprises bénéficiaires de 86,5% en moyenne.

Pour en savoir plus sur leur expérience dans le projet, nous avons posé quelques questions à M. Chokri Fitouri :

Cercle des PDGs des entreprises modèles

Quelle est l'activité principale de votre entreprise ?

PM Elcom Tunisie a été créée en 2008. Elle appartient au groupe PHOENIX MECANO Elcom dont le siège social se trouve en Suisse. Elle est spécialisée dans la fabrication et l'assemblage des Composants électromécaniques (Connecteurs/ µ-switch/ Pin de contacts/ petite Bobines …). Ces Produits sont destinés aux assembleurs des cartes électroniques de tous les domaines.

Qu'est-ce-qui vous a encouragé à adhérer au projet Kaizen ?

En 2011 et compte tenu de la situation instable dans le pays, le groupe suisse a commencé à délocaliser ses usines de Tunisie pour s'installer au Maroc. C'est à ce moment que nous avons commencé à chercher un moyen pour retenir le groupe dans le pays. Nous voulions augmenter notre compétitivité, en réduisant les coûts de la Production, et en diversifiant nos produits pour augmenter la marge, et maintenir ainsi l'usine en Tunisie en tant que site de production attractif. Et ceci sans avoir besoin d'investir des moyens coûteux, et en gardant le taux d'employabilité élevé sur la base de l'assemblage manuel.

Grâce à notre adhésion au projet Kaizen, nous avons pu augmenter considérablement notre productivité et améliorer la qualité des produits, ce qui a fortement impressionné le groupe suisse, et l'a même incité à ramener en Tunisie une grande partie des unités délocalisées.

Ces résultats ont permis d'augmenter le nombre de travailleurs. Ils sont plus de 1500 personnes maintenant.

Quelles étaient les difficultés que vous rencontriez dans la gestion quotidienne de votre entreprise avant l'introduction de Kaizen ?

Nous étions confrontés aux augmentations des coûts de la vie en Tunisie et aux revendications sociales des employés. Notre souci majeur était de trouver des solutions et maîtriser cette situation.

Pourriez-vous nous expliquer en bref les activités Kaizen effectuées dans votre entreprise ?

Nous avons commencé par sensibiliser le personnel à l'importance de l'approche Kaizen pour l'amélioration du rendement de l'usine et par conséquent son maintien en Tunisie.

Nous avons organisé des formations pour enseigner les outils et les concepts nécessaires au changement comme les 5S ; Dandori ; Poka Yoké ; Andon ; Gemba kaizen, la standardisation du travail, etc.

Quelle a été la réaction du personnel ? Est-ce qu'ils ont bien compris la philosophie de Kaizen ? Avez-vous trouvé une coopération de leur part ?

L'implication de la Direction Générale était un facteur très important pour convaincre et impliquer le personnel.

Avec le concept Kaizen, nous avons réalisé des actions sociales pour motiver le personnel et arrêter les revendications, tels que des récompenses, des primes liées aux gains générés par leur travail, et autres programmes d'encouragement.

Grâce à Kaizen, les conditions de travail se sont beaucoup améliorées. Des standards codifiant la manière la plus efficace d'accomplir une tâche ont été mis en place, l'espace de travail est maintenu propre, et le nombre d'accidents dans les sites où l'approche est appliquée a beaucoup diminué.

Qu'est-ce qui a changé après l'introduction de Kaizen ? Est-ce-que c'est seulement la productivité qui a été améliorée, ou la qualité aussi ?

La qualité s'est évidemment beaucoup améliorée. Nous avons noté aussi un sentiment d'appartenance et un sens de responsabilité chez les collaborateurs de l'entreprise.

Avez-vous trouvé l'approche Kaizen difficile à appliquer ? Que faut-il faire pour assurer la pérennité de l'approche ?

L'implantation n'a pas été difficile, mais c'est plutôt la pérennité qui nécessite beaucoup d'efforts pour l'ancrer dans les esprits du personnel. Des audits sont menés régulièrement, ainsi que des cercles « Gemba Kaizen ». La démarche « Gemba Kaizen » vise à l'amélioration continue des activités sur le lieu de production ». D'habitude, les managers sont cloîtrés dans des bureaux coupés du lieu de production. Donc, nous avons inclus la Direction Générale dans les cercles. Observer l'activité de production, côtoyer les machines et les opérateurs sont indispensables si on veut améliorer les processus.

Est-ce-que l'application de l'approche a coûté cher à votre entreprise ?

A part le temps consacré aux formations et à l'apprentissage de Kaizen, l'approche n'a pas demandé de gros investissements. Le profit est beaucoup plus important que le temps alloué.

Avez-vous noté un changement dans le comportement de votre personnel : efficacité, rapidité, leur humeur au travail ? Ont-ils l'air plus heureux ?

Il y a certainement un gain en rapidité et en efficacité grâce à l'optimisation continue des tâches. La satisfaction du personnel est bien visible. Ils sont plus impliqués dans l'entreprise grâce à la prise en compte de leur avis et de leurs conditions de travail.

La crise actuelle de la pandémie a-t-elle affectée votre entreprise ? En quoi Kaizen a été utile pour dépasser la crise ?

A cause des mesures sanitaires et la diminution du nombre du personnel, nous n'avons pas pu satisfaire les demandes de tous les clients à cause de la réduction des quantités de produits.

D'un autre côté, le personnel a adopté l'esprit Kaizen. Il a facilement suivi les instructions sanitaires mise en place et a veillé à les faire respecter.

Quelques outils Kaizen ont été efficaces durant la pandémie, comme « Gemba Kaizen » qui contraste avec les réunions classiques dans les bureaux, et tient la direction informée des résultats grâce au tableau de Shopfloor. De même, « Andon » donne la possibilité de voir le problème du processus sans avoir besoin de se déplacer, et « Dandori » assure une distanciation lors de changement de machines.

Si vous aviez un conseil (en relation avec l'approche de qualité et de productivité) à donner à un jeune qui crée son entreprise, lequel serait-il ?

Lors de l'étude technique du projet, je lui suggère de demander le conseil d'un expert ou d'un consultant expérimenté, soit du Centre technique des industries mécaniques et électriques (CETIME), ou l'un des directeurs des entreprises modèles du projet Kaizen. Je lui conseillerais aussi d'implanter l'approche Kaizen dès le début. Ça lui fera gagner beaucoup de travail et de temps. Plusieurs outils Kaizen l'aideront à réaliser de grandes performances. Voici des exemples :

• Le 5 « S »
  - Prévoir des espaces nécessaires pour les matières premières, les produits finis. Ça lui épargnerait des coûts de construction ou de location
  - Maintien du lieu de production propre, agréable et bien sécurisé pour assurer la stabilité de la productivité et de la qualité
• Gemba Kaizen, c'est l'implication du Personnel dans la résolution des problèmes quotidiens, leurs propositions pour augmenter la productivité, la qualité et le nombre des livraisons,
• Dandori, en réduisant les temps d'arrêt des machines dû à la rotation du personnel, et augmenter ainsi la productivité et la qualité, et réduire les accidents.

Nous vous remercions beaucoup M. Fitouri et vous souhaitons plus de succès !