l'Agence Japonaise de Coopération Internationale

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Nouvelles du terrain

16 août 2019

VERS LA TICAD 7 : «L'Afrique et moi» Partie 8 – Le «riz de l'espoir» fait reculer la pauvreté en Tanzanie : Motonori Tomitaka, ancien conseiller senior de la JICA

Selon les dernières prévisions des Nations unies, la population de l'Afrique subsaharienne devrait doubler de 1,06 milliard en 2019 à près de 2,1 milliards en 2050*. S'il est vrai que cela contribuera à la croissance de l'économie et des marchés, cette explosion démographique met au jour la nécessité de trouver rapidement des solutions aux problèmes de la pauvreté et des pénuries alimentaires. Parmi les efforts déployés par la JICA pour promouvoir le développement agricole dans les pays africains, un programme en particulier – mis en œuvre dans les années 1970 pour soutenir le développement de la riziculture sur les contreforts du Kilimandjaro, la plus haute montagne d'Afrique – a progressivement pris une ampleur nationale. La production de riz local (paddy), qui avoisinait les 280 000 tonnes dans les années 1970, a dépassé 2,86 millions de tonnes en 2016.

PhotoLa culture d'un riz irrigué soutenue par la JICA sur les contreforts du Kilimandjaro et dans d'autres régions du nord de la Tanzanie a ouvert la voie au développement de la riziculture en Afrique.


PhotoMotonori Tomitaka, ancien conseiller senior de la JICA, désherbe un canal d'irrigation.

Pour le huitième article de notre série intitulée VERS LA TICAD 7 : «L'Afrique et moi», nous avons interrogé Motonori Tomitaka, un ancien conseiller senior de la JICA qui a travaillé à la promotion de la riziculture en Tanzanie durant trois décennies, à propos des résultats de cette coopération à long terme et des changements impulsés par le riz dans la vie de la population.

*Perspectives de la population mondiale 2019 (ONU DAES / Division de la population)


Connue pour sa production de café, la Tanzanie était l'un des pays les plus pauvres d'Afrique

PhotoPlants de riz arrivant à maturation dans la zone irriguée de Moshi, région du Kilimandjaro, en 1996. Deux projets de coopération technique ont été réalisés pour soutenir la mise en place et la stabilisation d'une agriculture irriguée dans le cadre du projet de développement agricole dans la partie basse de Moshi (projet de don achevé en 1987) : le projet de centre de développement agricole du Kilimandjaro (1978-86), et le projet de développement agricole du Kilimandjaro (1986-93).


La Tanzanie comptait parmi les pays plus pauvres d'Afrique. L'histoire de la coopération de la JICA pour la promotion de la riziculture dans ce pays remonte aux années 1970.

«La région du Kilimandjaro était connue pour la production de café et de bananes, mais le niveau de vie des zones rurales ciblées par la coopération au développement du Japon était loin d'être prospère. La plupart des maisons étaient des huttes en briques de terre avec des toits de chaume, autour desquelles les enfants couraient pieds nus», se souvient M. Tomitaka à propos de sa première mission.

Le gouvernement tanzanien a demandé une aide au développement pour certaines régions à plusieurs pays. Le Japon s'est vu confier la région du Kilimandjaro.

«La JICA a soutenu l'élaboration du plan de développement intégré du Kilimandjaro. Le plan, centré sur la fonte des neiges du Kilimandjaro et la ressource précieuse que cela pouvait constituer, prévoyait d'axer le développement agricole sur la construction d'installations d'irrigation.»

M. Tomitaka a participé au projet de développement agricole du Kilimandjaro (1986-93) en tant qu'expert en agriculture de montagne, ainsi qu'au projet de centre de formation agricole du Kilimandjaro (1994-2001) en tant qu'expert en riziculture.

Amélioration du niveau de vie des agriculteurs grâce à la riziculture

Au début, de nombreux agriculteurs étaient sceptiques. Le riz était considéré comme «une culture offrant un faible rendement» dans la mesure où sa production dépendait de précipitations limitées. Ils ont changé d'opinion quand les installations d'irrigation construites avec l'aide du Japon ont permis d'améliorer le rendement de riz paddy (de 1,5 à 6-7 tonnes par hectare) en étant associées à une bonne gestion de l'eau, la préparation des terres (inondation, travail et mise à niveau du sol), des technologies rizicoles (utilisation de meilleures variétés et d'engrais, repiquage des jeunes plants en rang, désherbage), et d'autres moyens.

PhotoLa maison d'un riziculteur : L'introduction de variétés précoces a permis d'effectuer deux récoltes par an, ce qui s'est traduit par une nette amélioration du niveau de vie. (District de Meru, région d'Arusha)

«Les habitations précaires des agriculteurs ont été remplacées par des maisons en briques ou en parpaings avec des toits en tôle. Les enfants, auparavant privés d'accès au collège, étudient aujourd'hui pour certains d'entre eux au lycée, dans des écoles techniques, voire dans des établissements d'enseignement supérieur. Il y a plus de cliniques, d'écoles primaires et secondaires dans les villages. La culture du riz irrigué exige une main-d'œuvre nombreuse pour le semis, le désherbage ou encore la récolte, ce qui a favorisé les opportunités d'emploi.»

À mesure que le riz apparaissait comme une culture commerciale viable, les technologies de riziculture irriguée se sont diffusées dans les régions voisines. Plus tard, M. Tomitaka a été nommé conseiller principal du projet de coopération technique à l'appui des systèmes de services pour l'agriculture irriguée (2007-12) et du projet de soutien au développement de l'industrie rizicole en Tanzanie (2012-19).

La formation des agriculteurs a changé leur vie à bien des égards. «Je me souviens d'un agriculteur qui, tout à son bonheur d'avoir pu acheter une vache grâce à la vente de son riz, m'a confié avoir appelé son veau "Kumbuka Japani" (Souvenir du Japon). Avant, la plupart des agriculteurs vendaient le riz juste après la récolte, mais ils sont aujourd'hui nombreux à vendre du riz blanchi durant la basse saison. Les femmes sont devenues plus actives dans la société, en plus des tâches domestiques et agricoles, elles participent à la gestion du budget familial avec leur mari. La riziculture a eu un impact positif dans de nombreux domaines.»

La tradition agricole japonaise de l'entretien prend racine en Tanzanie

Alors que la production de riz semblait bien se porter, M. Tomitaka a été surpris par l'état des canaux d'irrigation lorsqu'il est revenu en Tanzanie après plusieurs années d'absence.

«Les canaux d'irrigation en béton étaient envahis d'herbe. Les canaux ne s'entretiennent pas tout seuls et ils deviendront inutilisables s'ils ne sont pas nettoyés. Une riziculture irriguée durable nécessite une maintenance et une gestion constantes des installations.»

Pour faire face à ce problème, la JICA a discuté avec les organisations concernées et a commencé à former les agriculteurs pour qu'ils soient plus proactifs en matière d'entretien et de gestion des installations d'irrigation. M. Tomitaka s'est alors remémoré un évènement bien précis de son enfance à Takachiho, dans la préfecture de Miyazaki, au sud du Japon.

«Derrière la maison se trouvait un canal d'irrigation. Au printemps, nous déracinions les jeunes pousses de bambou qui sortaient de terre à côté du canal. Nous savions que si nous ne faisions rien, les racines risquaient de perforer le canal. À chaque fois que j'en avais l'occasion, je montrais des photos de mon grand frère inspectant le canal et j'expliquais pourquoi il fallait prendre l'initiative d'entretenir le canal afin qu'il puisse continuer à fonctionner. Depuis peu, j'ai l'impression que les agriculteurs tanzaniens prennent conscience de l'importance de prendre en main l'entretien du canal.»

PhotoDu personnel tanzanien participe au désherbage d'un canal d'irrigation. (District de Monduli, région d'Arusha)


Revenu au Japon à la fin de l'année 2018, M. Tomitaka place de fortes attentes vis-à-vis de la prochaine génération.

«L'aide au développement du secteur rizicole en Afrique contribuera non seulement à améliorer les moyens de subsistance des agriculteurs, mais aussi à renforcer l'autosuffisance alimentaire de l'ensemble du continent africain. Les enseignements tirés de l'expérience de la Tanzanie, notamment au niveau de la gestion des dispositifs d'irrigation et de l'identification des problèmes liés au genre, formeront de précieux précédents pour le développement de l'industrie rizicole en Afrique. Le soutien aux échanges de vulgarisateurs agricoles et d'agriculteurs entre pays voisins devrait également donner de bons résultats.»

M. Tomitaka se souvient d'une chanson qu'il chantait en Tanzanie. La mélodie vient d'une chanson d'amour très populaire au Japon dans les années 1970 intitulée «Shiretoko Ryojo», mais avec des paroles qu'il a inventées. La chanson exprime la profondeur des sentiments qu'il nourrit envers ce pays où il a passé de nombreuses années.

♪Lorsque les plants de riz arrivent à maturité dans les contreforts du Kilimandjaro, rappelez-vous nos luttes passionnées et nos efforts pour des plaines plus productives, rentables et durables au fil des années. Le safari enfin fini, nous partons la tête pleine de souvenirs du sommet enneigé, des rêves dessinés sur les cartes, des terres bien façonnées et partout sur le continent des rizières.

(Profil)
Motonori Tomitaka
Après avoir obtenu son diplôme universitaire, Motonori Tomitaka devient en 1974 volontaire japonais pour la coopération à l'étranger (pour l'élevage). Il est nommé conseiller senior de la JICA de 1985 à 2016. En 1986, il participe au projet de développement agricole du Kilimandjaro. M. Tomitaka a également pris part au projet de soutien au développement de l'industrie rizicole en Tanzanie (2015-18), un projet de coopération mis en œuvre entre novembre 2012 et décembre 2019. Il est né à Miyazaki.

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